IA: les responsables chrétiens veulent peser sur la réflexion

Face au développement de l'intelligence artificielle, les responsables chrétiens veulent peser sur la réflexion autour d'une technologie porteuse de grands espoirs mais suscitant aussi "de graves préoccupations éthiques".
Deux jours après son élection, le pape Léon XIV mettait déjà le sujet sur la table le 10 mai.
L'intelligence artificielle, couplée à la nouvelle révolution industrielle, pose "de nouveaux défis pour la défense de la dignité humaine, de la justice et du travail", expliquait-il.
Le nouveau souverain pontife disait aussi sa confiance dans les réponses que peut apporter la "doctrine sociale" de l’Église, axée sur des principes de dignité de la personne, de solidarité et de bien commun notamment.
Aux États-Unis, plusieurs responsables évangéliques ont écrit le 22 mai au président Trump pour le mettre en garde contre l'avènement d'une IA "générale", potentiellement aussi puissante que l'intelligence humaine, et "des machines plus intelligentes que les humains que personne ne sait contrôler".
L'un des principaux signataires de la lettre était le pasteur conservateur Johnnie Moore, proche de Donald Trump et nommé début juin à la tête de la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), organisme dont l'ONU vient d'estimer que le travail "est un échec" du point de vue humanitaire.

Tout en prônant le leadership des Etats-Unis en matière d'IA, les signataires plaidaient pour impliquer dans cet effort "des personnes de foi" dont "la principale motivation n'est pas commerciale".
Cette vigilance des croyants n'est pas nouvelle.
Avant Léon XIV, l’Église catholique est intervenue à plusieurs reprises sur le sujet.
Le Vatican a gravé dans le marbre sa doctrine sur l'intelligence artificielle en janvier dernier, dans un texte intitulé "Antiqua et Nova", listant les "opportunités" mais aussi de "graves motifs de préoccupation éthique".
L’Église y exhorte "ceux qui ont la tâche de transmettre la foi" à se consacrer "avec soin et attention à cette question urgente".
"Nouvel esclavage"
Autre exemple d'implication: en 2020, le Vatican avait été à l'initiative de l'Appel de Rome pour une éthique de l'IA, signé par Microsoft, IBM, l'ONU, l'Italie et une myriade d'universités, exhortant à la transparence et au respect de la vie privée.
Et le pape François, défenseur dès 2019 du concept d'"algoréthique" (ou éthique de algorithme) et contempteur du "spectre d'un nouvel esclavage", avait consacré à l'IA son message pour la journée mondiale de la paix de 2024.
Car pour l’Église, la réflexion sur la technologie doit respecter l'enjeu central de la dignité humaine.

Cela signifie bannir tout "système qui ne peut tout simplement pas reconnaître la singularité de l'être humain et le respecter ", affirme à l'AFP Paolo Benanti, conseiller du pape et principal expert du Vatican sur l'IA.
La Fédération protestante de France aussi s'interroge, dans un texte publié en 2023, sur cette IA qui "finira peut-être d’évincer l’humain".
"Nous refusons toute +divinité+ technologique, imposant sa +vérité algorithmique+ et privant l’individu de sa libre responsabilité", affirme ce texte.
Au delà des questionnements théologiques, il y a aussi un enjeu pédagogique pour les Églises.
La conférence des évêques de France (CEF) s'est penchée sur ce "magistère des technologies", lors d'un colloque le 10 février dernier.
"Les IA seront elles demain le premier prescripteur de connaissances religieuses ?" s'est alors interrogé le théologien Laurent Stalla-Bourdillon.
Selon lui, "l’Église peut trouver dans ces outils une capacité inédite d'exprimer son point de vue". A condition de se lancer: "Si l’Église veut inspirer les consciences, il faut qu'elle occupe ce terrain".
Des plateformes existent déjà, telles que, en français, CatéGPT ou HelloBible, pour éclairer les fidèles.
L'entrepreneur français Antoine Couret, intervenant lors du colloque, a lui aussi souligné l'utilité pour l’Église de développer des modèles d'IA.
"La meilleure façon de comprendre ce qui se passe dans ce modèle est de se l'approprier, d'autant plus si on veut éviter un alignement sur les sociétés américaines", a-t-il affirmé.
Et selon lui, l'un des objectifs doit être de "donner plus d'humanisme, garantir la transmission, palier les peurs, et contribuer à la formation d'un nouvel esprit critique".
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