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Au CEA, une machine à remonter le temps grâce au carbone 14

| AFP | 178 | 4 par 1 internautes
L'accélérateur de particules du Laboratoire de Mesure du Carbone 14 du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), le 22 mai 2025 à saclay, près de Paris
L'accélérateur de particules du Laboratoire de Mesure du Carbone 14 du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), le 22 mai 2025 à saclay, près de Paris ( Thomas SAMSON / AFP )

Démasquer un faussaire, dater les agrafes en fer de Notre-Dame ou établir une chronologie du climat: dans un laboratoire du CEA, un accélérateur de particules remonte le temps grâce au carbone 14.

La technique de datation, qui a valu un prix Nobel à son découvreur Willard Frank Libby en 1960, a "révolutionné l'archéologie", rappelle à l'AFP Lucile Beck devant l'imposante machine qui occupe une pièce entière dans le complexe du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) à Saclay (Essonne).

La directrice du laboratoire de mesure du C14 (LMC14) raconte "la surprise" des préhistoriens quand, dans les années 1990, ses collègues sont parvenus à dater les foyers des artistes de la grotte Chauvet.

Le chef d’œuvre de l'art pariétal, qui ne pouvait être que postérieur à Lascaux selon les experts, était en fait vieux de 36.000 ans!

50.000 ans

Un technicien utilise la chaîne de graphitisation sous vide pour extraire du graphite à partir d’échantillons de CO₂ au laboratoire LMC14 (Laboratoire de Mesure du Carbone 14) du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA), à Saclay, le 22 mai 2025
Un technicien utilise la chaîne de graphitisation sous vide pour extraire du graphite à partir d’échantillons de CO₂ au laboratoire LMC14 (Laboratoire de Mesure du Carbone 14) du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA), à Saclay, le 22 mai 2025 ( Thomas SAMSON / AFP )

Le laboratoire date chaque année 3.000 à 4.000 échantillons pour ses propres recherches et celles de la "communauté scientifique nationale": CNRS, ministère de la Culture, CEA, Institut de recherche pour le développement (IRD) et Autorité de sûreté nucléaire et de radioprotection (ASNR).

Chaque prélèvement est d'abord examiné pour éliminer toute trace de contamination. "Typiquement, des fibres de pull-over" de l'archéologue qui a manipulé l'objet, s'amuse Mme Beck.

Il est nettoyé dans des bains d'acide et de base et brûlé à 800°C pour en récupérer le dioxyde de carbone (CO2). Un gaz réduit ensuite en graphite et inséré dans de minuscules capsules. Direction l'accélérateur de particules, qui va séparer et mesurer les isotopes du carbone.

Un isotope est une variante d'un même élément chimique, possédant un nombre différent de neutrons, ce qui change sa masse atomique.

Certains isotopes sont stables, comme le carbone 12. D'autres sont radioactifs et se désintègrent avec le temps, comme le carbone 14.

Celui-ci est créé dans la haute atmosphère par le bombardement des rayonnements cosmiques et solaires sur l'azote.

Dans l'atmosphère, ce carbone s'oxyde et devient du CO2 qui est absorbé par les végétaux lors de la photosynthèse, puis par les animaux qui consomment ces plantes.

Tous les organismes vivants contiennent du carbone 14. À leur mort, il se désintègre de façon exponentielle. Il n'en reste que la moitié au bout de 5.730 ans. Et quasiment rien après 50.000 ans, limite de la technique.

En comparant le nombre de particules de carbone 12 et 14 à la sortie de l'accélérateur, on obtient un âge relatif.

"Si la production de carbone 14 ne fluctuait pas au cours du temps, on pourrait transformer directement en date le taux qui reste dans l'échantillon", explique Mme Beck.

Mais les rayonnements cosmiques "ne sont pas constants". Tout comme l'intensité du champ magnétique qui nous en protège.

Les scientifiques ont dû mettre au point des courbes de calibration, basées sur des échantillons dont l'âge est connu avec certitude.

Ce qui permet in fine d'identifier un faux tableau, en déterminant que le lin de la toile a été récolté après la mort du peintre supposé.

Un technicien presse des échantillons de graphite dans une cathode en aluminium afin d’éviter toute contamination avant le processus de mesure, au laboratoire LMC14 (Laboratoire de Mesure du Carbone 14) du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA), à Saclay, le 22 mai 2025.
Un technicien presse des échantillons de graphite dans une cathode en aluminium afin d’éviter toute contamination avant le processus de mesure, au laboratoire LMC14 (Laboratoire de Mesure du Carbone 14) du Commissariat à l’Énergie Atomique et aux Énergies Alternatives (CEA), à Saclay, le 22 mai 2025. ( Thomas SAMSON / AFP )

Ou d'établir une chronologie du climat, en analysant le squelette en calcite du plancton au fond des océans.

Blanc de plomb

Si le carbone 14 permet de dater ossements, bois ou tissus, le LMC14 a développé des techniques de pointe pour analyser des matériaux qui ne sont pas directement issus du vivant.

Par exemple, en datant le carbone "piégé" dans le fer, lorsque le minerai a été chauffé avec du charbon de bois. Et montrer ainsi que les agrafes en fer de Notre-Dame de Paris ne dataient pas de sa restauration, mais bien de sa construction.

Ou en utilisant le blanc de plomb, un pigment synthétisé depuis le 4e siècle avant J.-C., que l'on retrouve sur de nombreux bâtiments et œuvres d'art.

Pour le fabriquer, on "mettait du plomb à corroder avec du vinaigre et du crottin de cheval, qui produit du CO2 par fermentation", raconte Mme Beck. Le pigment contient ainsi du carbone organique.

"Je dis toujours aux archéologues: ne nettoyez pas les traces de corrosion, elles racontent aussi notre passé!", poursuit-elle.

C'est ce qui a permis de dater les tombes d'une abbaye médiévale dans lesquelles n'avaient été retrouvées que de petites bouteilles en plomb. En se décomposant, les corps avaient dégagé du CO2 qui les avaient corrodées.

"Cette corrosion, c'était finalement le seul témoin qui restait de l'esprit du moine", songe la chercheuse.

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