En France, des enseignants moins satisfaits qu'ailleurs et en manque de reconnaissance

Seuls 4% trouvent leur profession valorisée et ils sont moins satisfaits que leurs collègues d'autres pays: la situation des enseignants français est "préoccupante" pour l'OCDE, qui publie mardi sa dernière étude internationale Talis sur l'enseignement et l'apprentissage.
"Il faut aujourd'hui peut-être rouvrir ce grand chantier du métier d'enseignant" en France, a souligné Eric Charbonnier, spécialiste éducation de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), lors de la présentation de cette enquête internationale, la plus grande sur les enseignants et chefs d'établissements, publiée tous les cinq ans en moyenne.
"Globalement, les résultats sont préoccupants, notamment sur tous les aspects de formation professionnelle des enseignants, de satisfaction dans le métier, de culture de coopération qui a du mal à se mettre en œuvre", a-t-il ajouté.
Quelque 280.000 enseignants dans 55 pays et territoires ont participé en 2024 à cette enquête, dont un échantillon représentatif de 3.766 professeurs français de collège et 2.246 en école élémentaire.
Cette étude montre une satisfaction moindre des enseignants par rapport à la moyenne de l'OCDE. Si près de 90% des enseignants de l'OCDE se déclarent satisfaits de leur métier, en France, ils sont 79%, une proportion qui reste élevée mais place le pays en queue de peloton avec le Japon.
En outre, seuls 54% des professeurs français estiment que les avantages d'être enseignant l'emportent nettement sur les inconvénients, le taux le plus bas de l'OCDE.
Problèmes de discipline
Parmi leurs sources de mécontentement, les enseignants français souffrent notamment d'un cruel manque de reconnaissance. Ils sont seulement 4% à estimer leur profession valorisée par la société. C'est en recul par rapport aux 7% de 2018, et en dessous de la moyenne de l'OCDE, déjà basse (20%).
Les professeurs français ne sont aussi que 4% à penser que les décideurs politiques accordent de l'importance à leur avis.
Les salaires demeurent également une source d'insatisfaction. En France, seuls 27% des profs de collège et 22% des enseignants d'élémentaire sont satisfaits de leurs salaires (contre 40% dans l'OCDE).
Leur grogne vise aussi leurs conditions d'enseignement. Comme ailleurs dans l'OCDE, les professeurs français font plus souvent face à des élèves perturbateurs. Ils sont 80% à dire qu'ils connaissent des problèmes de discipline dans leurs classes. C'est plus que la moyenne de l'OCDE. Et ils doivent consacrer 18% de leur temps scolaire à la discipline.
Ils connaissent aussi des classes de plus en plus hétérogènes. La proportion d'enseignants travaillant dans des écoles où au moins 10% des élèves ont des besoins éducatifs particuliers a ainsi bondi de 42% à 74% en France entre 2018 et 2024. Et ceux dont les écoles accueillent au moins 1% d'élèves réfugiés est passée de 44% à 65%.
"Défaillances" sur la formation
Les difficultés du métier rejaillissent sur l'état général des enseignants. Ils sont 18% à dire ressentir beaucoup de stress, contre 11% en 2018. Parmi les sources de celui-ci: les réformes, le travail administratif ou le fait de devoir modifier les leçons pour les élèves à besoins particuliers.
C'est aussi du côté de la formation que leur insatisfaction s'exprime: le nombre de jeunes enseignants français qui estiment avoir été bien préparés à la pratique pédagogique s'élève à 50% au collège et 34% en école élémentaire, en-deçà de la moyenne de l'OCDE.
"On a vraiment des défaillance en France sur ces questions-là", estime Eric Charbonnier. Pour lui, la réforme de la formation initiale des professeurs annoncée cette année, qui ramènera les concours enseignants à bac+3 au lieu de bac+5, "va avoir un effet sur l'attractivité". Mais "il faut que la formation soit efficiente", souligne-t-il.
Enfin, exemple des failles de la formation pour s'adapter aux enjeux actuels, seuls 9% des enseignants ont indiqué en 2024 avoir été formés sur l'intelligence artificielle dans les 12 derniers mois.
Dernier point noir, le manque de coopération entre professeurs dans les pratiques enseignantes en France. Là aussi, la France est bonne dernière, avec seulement deux heures hebdomadaires consacrées à temps plein au travail d'équipe, contre trois heures en moyenne dans l'OCDE, et quatre à cinq heures dans certains pays.
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